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Paris 2024, Mondial de rugby, GP de France, avenir de Mbappé… l'interview intégrale d'Oudéa-Castéra,... - RMC Sport

EXCLU RMC Sport – La ministre des Sports Amélie Oudéa-Castéra a accordé un entretien exclusif de plus d’une heure à RMC Sport. Elle y fait le point sur l’organisation des Jeux olympiques de Paris 2024, le Mondial de rugby qui débute dans moins de 100 jours en France mais évoque aussi l’actualité, notamment la gestion des instances du sport français.

Avant d’évoquer la Coupe du monde de rugby, un mot sur votre année au ministère des Sports: ça a été une année très remplie, peut-être plus que vous ne le pensiez en prenant ce poste. Cela a été un sprint-marathon…

Une année d’intensité. J’ai exactement ce sentiment, c’est-à-dire de faire un marathon en sprint. C’est extraordinairement exigeant, plus encore que je ne l’avais anticipé. Il y a eu des moments forts, des moments douloureux. Il y a eu des moments avec quelques sentiments du travail accompli, dans des moments de crise qu’on a gérés, qu’on a su laisser derrière nous. Et il y a eu aussi beaucoup d’images de tout ce que j’ai construit avec l’ensemble des acteurs du sport, autour des ateliers qui sont un peu moins médiatisés, mais sur toute une série de thématiques. Parce que j’avais vraiment à cœur qu’à la fois l’organisation de nos grandes compétitions, rugby, JO, Jeux paralympiques, et les crises qu’on connaît dans le sport français, n’entament pas ma capacité à délivrer ce pourquoi fondamentalement je suis venue, qui est la feuille de route pour le sport et pour mettre le sport d’avantage au cœur de la société. Donc c’est toutes les actions sur la place du sport à l’école, sur le sport-santé, sur le sport pour les personnes en situation de handicap, sur nos équipements, notre cadre de vie, sur l’insertion sociale par le sport, sur les chantiers en faveur de la reconversion de nos athlètes, leur suivi socio-professionnel, en faveur du bénévolat, qui sont toute une série de thématiques sur lesquelles j’ai beaucoup investi avec mes équipes et avec l’ensemble du sport français. Pour vraiment faire avancer les plans d’action, dérouler des éléments de progrès, pour qu’on arrive dans ce pays à avoir une place plus centrale du sport.

Pouvez-vous nous raconter un peu comment vous travaillez avec le président de la République sur les grandes thématiques sport, la complicité que vous pouvez avoir avec lui sur ces thématiques…

Cette complicité est très forte parce que d’abord, on se connaît depuis longtemps et depuis l’âge de 20 ans, je sais son goût pour le sport. Authentique. Dans sa vie, y compris dans ces moments de charge extrême, c’est une personne qui trouve du temps pour faire du sport, depuis quasiment toujours. Le deuxième élément, c’est que j’ai eu la chance de piloter sa deuxième campagne présidentielle sur la thématique du sport. J’ai beaucoup réfléchi, beaucoup échangé avec lui et ses équipes. On a écrit une feuille de route à l’époque ensemble. Et puis lorsqu’il m’a nommée dans le gouvernement d’Elisabeth Borne, j’ai passé du temps avec Elisabeth Borne pour qu’on arrive ensemble à ajuster un petit peu cette feuille de route, à vraiment se l’approprier complètement. Elle m’a demandé certains ajouts. Moi-même j’ai pu proposer des re-hiérarchisations. Et donc depuis quasiment la première semaine de mon entrée au gouvernement, j’ai le sentiment d’avoir un cap qui est incroyablement clair et qui m’a permis de dérouler une méthode. Tout de suite, j’ai réuni les acteurs du sport, en juillet 2022 à l’Insep. A l’époque, il y avait beaucoup de questions autour de la dilution des responsabilités, de l’ambigüité des rôles dans le sport français, qui fait quoi entre le ministère des Sports, l’agence, le comité d’organisation, le CNOSF… On vivait dans un moment de confusion. Et là, j’ai vraiment proposé une vision au sport français, cette feuille de route avec un cap, une perspective et derrière, la réparation des rôles et des responsabilités. Et depuis ce séminaire du 18 juillet 2022, on n’est plus jamais revenus sur ces sujets-là. C’est un énorme acquis qu’on a pu mettre derrière nous dès l’été 2022. Et du coup par la suite, cette méthode-là, de la transparence sur le fond et de la clarté dans les responsabilités, je l’ai déroulée au fil des mois, avec une fois par mois, un atelier sur une thématique précise. J’ai fait la reconversion des sportifs de haut niveau en septembre, la transition écologique du sport en octobre, l’insertion par le sport en novembre, le soutien au bénévolat en décembre, le e-sport en janvier 2023, le sport féminin en février, l’inclusion par le sport avec les personnes en situation de handicap il y a quelques jours… Là, je m’apprête à faire le prochain sur la question des métiers du sport, qui va être mon grenelle des métiers du sport le lundi 5 juin. Dans la foulée, celui sur le sport entreprise et ensuite un dernier, à l’horizon de septembre, sur le sujet du sport-santé et de la santé des seniors par le sport. Tout ceci va m’amener naturellement à une année qui va être exceptionnellement dense, 2024, dans laquelle on aura les Jeux olympiques et paralympiques, et la grande cause. Et cette grande cause sociétale, que le président de la République a décidé de mettre à l’honneur autour du sport, c’est fondamental parce que ça va être le bras armé sociétal des Jeux. Et donc ça va être vraiment l’occasion de reboucler sur tous ces temps d’action et en même temps aller au plus près des Français pour faire du sport avec eux, être dans cette logique d’exemplarité qui me tient aussi beaucoup à cœur.

Vous êtes l’une des ministres les plus médiatiques du gouvernement. Comment le vivez-vous?

Je ne me pose pas du tout la question. Je sens qu’il y a une pression forte, des attentes qui sont très importantes, parce que ce sont des très grands événements, parce qu’il y a aussi malheureusement des crises dans le sport français que les Français attendent qu’on résolve. Et donc j’enchaîne. J’essaie de le faire avec le plus fort engagement possible, de toutes mes forces. Et j’essaie de le faire avec le plus de pédagogie possible, le plus de maîtrise du fond possible, parce que ça exige beaucoup de compétences, donc beaucoup de travail, mais aussi beaucoup de capacité d’explication. On le voit en ce moment sur certains chantiers des Jeux ou sur des chantiers qui n’ont pas grand-chose à voir avec les Jeux mais qu’on impute aux Jeux. Je pense aux polémiques récentes autour de l’hébergement d’urgence ou aux propos qui ont été assez éloignés des faits sur le sujet du logement étudiant. On voit qu’il y a très régulièrement des polémiques qui surgissent et qui me font dire qu’il faut faire très attention, d’abord à préserver ce capital que ce sont ces Jeux olympiques et paralympiques qui peuvent nous fédérer, qui doivent être un moment de bonheur et de communion nationale, il faut faire attention à cette dimension-là, et surtout ne pas accabler de tous les maux les Jeux olympiques et paralympiques, de ne pas en faire les bouc-émissaires de difficultés que nous avons par ailleurs et que nous nous efforçons de traiter au cœur de la solidarité gouvernementale, en liaison étroite avec les collectivités territoriales et les préfets dans les territoires.

On est à 100 jours (99 ce jeudi) de la Coupe du monde de rugby en France, un évènement majeur qu’on a souvent tendance à présenter comme une répétition des JO 2024. C’est déjà un gros enjeu pour le sport français et la France?

C’est un très bel enjeu. C’est un gros enjeu, une grosse responsabilité là aussi. Et c’est, je pense, une très belle perspective que ces 51 jours de compétition. On a tous en tête ce match d’ouverture, qui va sans doute être assez phénoménal contre les Blacks le 8 septembre au Stade de France. On a cette compétition qui va nous emmener jusqu’au 28 octobre, avec neuf stades, qui vont vibrer derrière les vingt meilleures équipes au monde. C’est 660 joueurs de rugby et à peu près une communauté d’un petit millier de parties prenantes avec tous les staffs autour de ces équipes incroyables. C’est un très grand rendez-vous aussi en termes d’organisation. Il faut qu’on soit au rendez-vous sur la sécurité, on est au travail là-dessus avec Gérald Darmanin. Il y aura 3.000 policiers et gendarmes au quotidien, près de 10.000 agents de sécurité privée qui seront mobilisés tout au long des 51 jours de l’événement. Il y a aussi une attention qui est portée au social, avec la signature avec l’ensemble des partenaires sociaux d’une chartre sociale avec des engagements forts en faveur des équipes et de tous les partenaires qui sont dans les chantiers ou dans les travaux de préparation de cette Coupe du monde de rugby. Et puis c’est aussi une Coupe du monde qui est très engagée. Il va y avoir une coupe internationale de rugby-fauteuil, un tournoi national des quartiers avec 5.000 enfants, un tournoi inclusif pour lutter contre toutes les formes de discrimination. Et il y a avoir aussi beaucoup de projets solidaires soutenus dans le domaine du handicap, de l’éducation, de l’éco-responsabilité, avec là-aussi des engagements forts qui sont pris par le comité d’organisation, notamment sur la lutte contre le gaspillage alimentaire dans l’ensemble des stades et aussi sur l’impact carbone, sa compensation, avec notamment une part du train qui sera importante dans les déplacements de toutes les équipes qui vont être disséminées pendant plusieurs semaines à travers vingt camps de base. Donc ça, c’est fantastique. Et on a aussi quelque chose qui va être très spécifique pour faire vivre l’événement dans les territoires: il va y avoir les dix villages rugby, une mise à l’honneur de l’art de vivre à la française, avec le XV de la gastronomie et des grands chefs qui vont être embarqués derrière tout ça. Et puis, là aussi, on peut parler d’héritage puisque le bénéfice que fera cet événement sera entièrement réinvesti dans la promotion du rugby amateur dans les territoires pour faire grandir l’engouement, le développement de la pratique. On sait qu’il y a une vraie attractivité pour ce sport dans notre pays, un XV de France qui rayonne et au global, je pense qu’à travers cet événement, on va réaffirmer la capacité de la France à organiser de très grands événements, magnifiquement, et on va aussi montrer qu’on est capables de faire émerger cette nouvelle référence d’événements sportifs de très grande ampleur, sans oublier aussi les retombées économiques pour les territoires, le développement du tourisme, qui va aussi bénéficier à toutes nos régions.

Un an après les évènements du Stade de France lors de la finale de la Ligue des champions, c’est aussi un enjeu sécuritaire…

Une sécurité dans ces neuf stades, à travers huit régions. Elle va mobiliser les forces de sécurité intérieure. Une bonne complémentarité, aussi, des forces avec les agents de sécurité privés, qu’on est train de former en très grand nombre et qu’on va mobiliser autour de cet évènement. Évidemment, sous la houlette de Gérald Darmanin, le ministre de l’Intérieur, tous les travaux sont menés en lien avec les préfets dans les territoires et des comités de site, qui permettent de veiller à chacune des dimensions de cette sécurisation. Elle va aussi porter sur la sécurisation des camps de base dans les 20 endroits où les équipes auront choisi de se préparer. On a appris de nos échecs, on est mobilisés de manière totale et très harmonieuse avec Gérald Darmanin et avec cette courroie de transmission dans les territoires, qui fait qu’on sera au rendez-vous.

Vous trouvez que ça va mieux dans le rugby français? Il s’est passé beaucoup de choses, que ce soit fédération, comité d’organisation… est-on sûr qu’il y aura des bénéfices ? Comment ça se passe dans cet écosystème?

Ce qu’on voit d'intéressant dans cette Fédération française de rugby, c’est que la vie démocratique a repris ses droits et que les instances sont résilientes. On se souvient de la démission de Bernard Laporte en janvier 2023. Il y a eu ensuite eu une période de confusion, de flottement. Les équipes ont voulu s’en tenir au calendrier électoral et je trouve que les choses se passent correctement. On a assisté à ce premier round de renouvellement des membres au sein du comité directeur de la Fédération. Il y a maintenant, le 14 juin, l’élection du président de cette Fédération. Dans l’intérim, Alexandre Martinez a fait un bon travail pour arriver à réaligner les énergies, à tenir la maison et faire en sorte d'aplanir un certain nombre de différends. La maison rugby sera absolument en ordre pour accueillir le monde entier le 8 septembre prochain pour la Coupe du monde de rugby. Et c’est ça l’essentiel.

Gardez-vous un oeil sur Bernard Laporte, qu'on a vu très proche du XV de France?

Bernard Laporte a dit très clairement qu’il n’était pas du tout question pour lui, quand des rumeurs ont existé, de devenir un consultant ou un manager général de l’équipe de France. Après, il y a des années de lien, des années d’amitié. On connaît la force de la relation avec Fabien Galthié et un certain nombre de joueurs du XV de France. Qu’il reste une personnalité marquante, extrême connaisseur du rugby et qu’il soit du coup en capacité de témoigner son soutien aux joueurs, je le respecte et je trouve ça naturel. Quand il y a eu une défaite lors de la ratification démocratique du vice-président délégué, il a tout de suite tiré les conclusions de cela. J’avais salué cette décision qui, de mon point de vue, était saine et nécessaire. Je lui fais confiance pour rester à la place qui est la sienne aujourd’hui. Il doit se défendre. Il y aura son procès en appel dans les temps à venir. Je veux que chacun soit à sa place, et je crois que c’est quelque chose qu’on a plutôt bien réussi à faire au cours des mois écoulés.

Fédération des sports de glace, rugby, football… énormément de fédérations ont fait parler d'elles en mal ces derniers mois. Comment expliquez-vous que tous ces dysfonctionnements sortent pratiquement au même moment? Est-ce un hasard ou est-ce que cela prouve qu'on a un problème dans nos fédérations?

Il y a d’abord un vrai concours de circonstances. Cette Coupe du monde au Qatar avec les sorties de routes répétées et très visibles de Noël Le Graët, ce procès de Bernard Laporte dont personne n’avait choisi la date à part la justice et dont le verdict tombe le 13 décembre 2022, les difficultés qui arrivent en amont de tout ça avec Claude Atcher et le GPI France 2023, avec des salariés qui sont à bout et des risques psycho-sociaux très importants… Tout ça est objectivement un concours de circonstances totalement inattendu et imprévisible. D’un autre côté, ce qu’on a vu également dans ces crises, c’est qu’il y avait un certain nombre de renforcements indispensables à apporter à nos Fédérations. Je pense à des contre-pouvoirs, à des instances qui jouent pleinement et jusqu’au bout leur rôle démocratique, je pense à la qualité du débat au cœur de ces instances, je pense au renforcement des comités d'éthique, je pense à plus de démocratie exprimée par le terrain. Tout ça est ressorti à des degrés divers dans les différentes crises que nous avons connues. La bonne nouvelle, c’est que la loi du mars 2022, qui a été adoptée par le parlement en amont de mon arrivée, apporte un certain nombre de solutions. Elle prévoit pour une partie importante un vote direct des clubs dans l’élection des présidents de fédération, elle renforce la prévention des conflits d'intérêt avec des déclarations à la Haute autorité de la transparence de la vie publique, elle a aussi cet engagement de parité au niveau national dans les ligues en 2028… Il y a une série de progrès et une ouverture des instances aux entraîneurs, aux sportifs de haut niveau, aux arbitres, qui va permettre d’ouvrir la gouvernance de ces fédérations et de réduire un entre soi qui a été trop fort à un moment. Mais on voit que ce n'est pas suffisant. Il y a un certain nombre de dysfonctionnements qui sont apparus et d’éléments de pragmatisme qu'il faut absolument qu'on arrive à injecter dans nos statuts pour qu’on puisse résoudre plus vite et plus facilement les crises, renforcer nos exigences éthiques, renforcer la vitalité démocratique et aussi avoir un agenda sur le suivi de la prévention des violences, qu’elles soient à caractère sexiste ou sexuel, qu’elles soient à caractère physique ou psychologique, qu’on arrive à avoir une bien meilleure protection des pratiquantes et des pratiquants. Pendant très longtemps, on a pensé que nos présidents de fédérations avaient deux trucs à faire : accroître leur base de licenciés et préparer le haut niveau. En fait, non. Il y a une troisième dimension sociétale de responsabilité, de protection des pratiquants, d’égalité hommes-femmes, de lutte contre toutes les formes de discrimination et d’engagement dans la transition écologique qui sont au cœur aujourd’hui de ce qu’on attend de ces fédérations.

Sur la parité exigée dans les instances sportives d’ici 2028: des fédérations se questionnent, notamment dans celles où la part masculine est majoritaire. Certains se demandent comment faire pour réunir autant de femmes compétentes dans ces organes de décision. Cette volonté de parité, cela peut-il être un piège?

Structurellement, je ne suis pas une grande fan des quotas. J'ai toujours pensé que les choses pouvaient avancer. Sauf qu'il faut faire le constat lucide que les choses n’ont pas du tout avancé au rythme où elles auraient dû. Il y a un moment où, comme ça s'est passé dans les entreprises au niveau des conseils d'administration, il faut accélérer les choses. Ça oblige à passer à l’action. On va aller chercher ces femmes, il n’y a aucune raison qu’on ne trouve pas un bon nombre de personnes qui ont envie de s’engager. Cela suppose de bien revisiter les bases du bénévolat, c'est-à-dire simplifier la vie administrative de nos bénévoles. Ce n’est pas possible que, à chaque modification - même mineure - de statuts, on soit obligés d’aller en préfecture. Il faut numériser tout ça et qu'on mette fin à ces démarches trop lourdes. Il faut qu’on arrive à former, à avoir du mentorat, à communiquer sur le fait que ces jobs sont passionnants. J’ai été membre d'instance fédérale à titre bénévole et j’ai adoré ce que j’ai pu trouver dans ces instances comme engagement, comme compétence, comme passion et comme dévouement. Il faut aussi arriver à rajeunir ces instances. Ce qui est très important, c’est de montrer à quel point le travail qui est fait par des bénévoles mérite reconnaissance et validation des acquis de l’expérience. C’est tout le travail que nous menons au gouvernement sur la VAE, ce service public de la valorisation des acquis de l’expérience qui va derrière ouvrir des droits à la formation et la reconnaissance pour les bénévoles qui s’engagent. A l'horizon de la mi-2024, on aura complètement avancé sur le sujet de la reconnaissance des acquis sur expérience. On a mis le paquet sur cette action car elle est centrale pour le bénévolat. Je rappelle que le secteur du sport est le premier secteur d’engagement en France. C’est une richesse incommensurable. En valeur économique, ça pourrait se chiffrer à plusieurs milliards d’euros. Il faut qu'il y ait une vraie présence derrière ces bénévoles.

Avez-vous des nouvelles de Noël Le Graët? Il était question qu'il porte plainte contre vous...

Je n’ai pas de nouvelles de Noël Le Graët. Une plainte déposée à mon encontre ? Pour l’instant, je n’ai pas été destinataire d’une telle plainte, à ce stade en tout cas.

L’enquête sur la Fédération française des sports de glace publiée par RMC Sport laisse apparaître que Didier Gailhaguet, a priori plus responsable de rien, tire encore beaucoup de ficelles. Que pensez-vous de cette situation?

J’ai vu comme vous ces éléments dans les médias. Un certain nombre de dysfonctionnements de divers ordres nous ont conduit à diligenter cet audit. Cet audit va être fini dans les tout prochains jours. J’en aurai les conclusions. Fidèle à notre méthode, qui est de respecter le temps du contradictoire, la cohérence et les étapes de nos actions, une fois que j’aurai ce rapport en main, qu’il aura été l’objet d’un moment de contradiction dans le respect des droits des parties, on en tirera les conclusions qui s’imposent. Pour l’instant, je ne peux pas m’exprimer publiquement. Mais nous sommes au travail, déterminés à traiter les problèmes partout où ils se trouvent.

Le CNOSF a perdu sa présidente, qui a démissionné. Que s'est-il passé au bureau exécutif et que va-t-il se passer?

J’ai pu échanger de manière informelle et tout à fait interactive avec le bureau exécutif du CNOSF. C’est un rendez-vous que je leur avais proposé au cœur de la tourmente des derniers jours avant l'assemblée générale de jeudi dernier. Ils avancent bien dans le chemin démocratique de résolution de cette crise. Je rappelle que Brigitte Henriques a souhaité que sa démission ne soit effective qu’à partir du 29 juin. C’est au lendemain de cette décision effective que pourra être convoqué un conseil d'administration. Je pense qu’ils ont à cœur de faire émerger un ou une leader dans leur rang qui puisse à la fois rassembler l’ensemble des fédérations olympiques et non olympiques, et être le meilleur leader de la préparation des Jeux olympiques. Le CNOSF a beaucoup d’actions à mener pour réussir les Jeux. Sa part et son rôle sont très importants. Ensuite, une fois que cette personnalité aura émergé, il y aura un adoubement, une ratification par l'assemblée générale qui devra être convoquée probablement dans un délai de deux mois après le choix de ce représentant. Vous savez à quel point je suis attachée à l'autonomie du mouvement sportif, donc je ne me prononce pas sur qui doit être la bonne personne. Mais j’ai pu porter un certain nombre de messages sur le fait qu'il y avait cette exigence d’unité, d’exemplarité, de rassemblement et d’action, y compris dans la préparation de l'héritage des Jeux. On sait que, si on fait bien notre travail, au lendemain des Jeux olympiques et paralympiques, beaucoup de pratiquants auront envie de rejoindre nos clubs sportifs. Il faut donc que nos fédérations soient prêtes à les accueillir.

Le conseil d'administration doit-il adouber le nouveau président le plus rapidement possible?

Je pense qu’il faut de la rapidité, mais ça ne veut pas dire de la précipitation. J’ai pu faire le point avec eux. Ils ont cette intention de convoquer un conseil d'administration à la toute fin du mois de juin ou au tout début du mois de juillet. C’est important que ce rendez-vous soit bien préparé parce que le candidat qui émergera devra pouvoir avoir échangé avec la totalité du mouvement sportif, avec sa composante olympique mais aussi non olympique.

Le CIO a-t-il fait part de sa crainte sur le CNOSF?

Pas de sa crainte, de sa vigilance, de l’envie de voir cette crise se purger le plus rapidement possible. Les crises, ça arrive dans la vie. Ce n’est pas forcément grave, on progresse après des crises. Ce qui n’est pas forcément acceptable, ce sont des crises qu’on laisse perdurer et détruire. On était tout à fait à l’unisson avec le CIO dans ce message-là. J’ai eu, dans toute la période, des échanges réguliers avec le CIO. Je sais qu’il nous aidera à rebondir très vite et à avoir ce sursaut démocratique et éthique que j’ai appelé de mes vœux à la tête de cette instance.

David Lappartient est-il le profil idéal?

Il a beaucoup de qualités, beaucoup d’expérience, beaucoup de dynamisme. Il a incontestablement le type de profil idoine pour ces responsabilités. Après, ce n’est pas mon choix, c’est le choix du mouvement sportif, c’est ce qui est extrêmement important. C’est une candidature qui devra rassembler. Il faudra aller très vite pour être tout de suite sur les prochaines échéances qui se profilent et tout le travail à mener autour des Jeux olympiques.

Nous sommes à un peu plus d’un an des Jeux olympiques de Paris, en avez-vous assez de toutes ces polémiques autour des Jeux?  

Moi ça me semble tout à fait normal et légitime qu’on parle d'autres dimensions que le sport sur ces jeux parce que ces jeux vont au-delà du sport il y a des enjeux majeurs autour de l’organisation, de la sécurité, des transports, des services de la restauration de la sécurité privée on a une dimension extrêmement importante sur l’héritage également. Pas que l’héritage sportif, mais aussi comment on va mener à bien le chantier de la baignabilité de la seine et de la marne, comment on transforme la Seine Saint Denis, comment on va recoudre les parties du territoire qui doivent l'être grâce à de nouveaux aménagements urbains, comment on arrive à développer l’offre de logements sociaux, comment on réussit nos engagements écologiques dans le cadre de ces Jeux. Toutes ces conversations sont légitimes et ça fait la richesse extraordinaire de ce projet et de cette opportunité. Parc contre, ce que moi je dis, c’est qu’il ne faut pas véhiculer de fausses informations. La désinformation, c’est le pire service à rendre à notre pays. J’y reviendrai peut-être, mais sur le logement étudiant, on a raconté tout et n’importe quoi à ce sujet, et c’est très important de bien remettre les points sur les i. Sur le fait qu’aucun étudiant ne sera pénalisé à l’été 2024 et encore moins par les jeux olympiques et paralympiques. Il ne faut pas faire porter aux jeux olympiques le chapeau de difficultés qu’on n’a par ailleurs, notamment sur les problématiques que l’on rencontre aujourd’hui en matière d'hébergement d’urgence. Un sujet sur lequel le gouvernement est engagé aux côtés des sans-abris des associations de solidarité, des élus, aux côtés des préfets, des associations dans les territoires, pour aider à la résolution la plus humaine la plus digne la plus efficace de cette question des sans-abris, mais qui n’est pas la faute des Jeux olympiques comme on a pu l’entendre dire. Ce sont pour moi les deux choses importantes : pas de désinformation, et ne pas faire des Jeux les bouc-émissaires.

Pourquoi n’est-ce pas le ministère des Sports qui gère la billetterie de la cérémonie d’ouverture?

C’est une question d’unité dans les équipes. Vous savez que cette cérémonie d’ouverture est placée sous le haut commandement de Gérald Darmanin, avec la délégation qu’il a donnée à Laurent Nunez. Il est donc important que la direction numérique du ministère de l’intérieur puisse piloter la mise en place de cette billetterie avec la logique de gestion des flux qui ira avec le contrôle des volumes de personnes, et à travers aussi l’identification des noms et prénoms de ces personnes de manière tout à fait conforme avec les exigences de la protection des données personnelles. C’est donc une unité opérationnelle et de commandement, et je rappellerais que le ministère des Sports a fort à faire sur toute une série d’autres choses. C’est très bien qu’il y ait cette répartition des rôles et des responsabilités : le préfet de la région Île-de-France avec toutes ses équipes sont chargés de la dimension fluviale de l’événement, il y aura aussi un concours de l’armée. Tout le monde retrousse ses manches et c’est très bien. C’est important.

La jauge de 400.000 sera-t-elle amenée à évoluer? 

Nous n’avons pas encore de date précise d'une jauge exacte. Ce que je peux vous confirmer c’est que nous aurons 100.000 billets sur les quais bas, plusieurs centaines de milliers sur les quais hauts. Et au global si vous voulez vraiment que je sorte un chiffre je pense que dans Paris, on aura à peu près un million de personnes qui pourront bénéficier du spectacle de plus ou moins près, mais qui auront accès à ces festivités et envie de profiter de cette cérémonie d’ouverture.

Il manque aussi un partenaire à cette cérémonie d’ouverture. Les négociations avec LVMH ont-elles avancé ?

Elles avancent, moi je suis optimiste (sourire). 

Possible qu’il soit le prochain partenaire des Jeux? 

C’est une possibilité (sourire). 

Voir Mbappé, Wembanyama, Dupont, Marchand sur ces Jeux, c’est la jeunesse française qui réussit?

C’est extraordinaire, sans oublier des femmes qui sont très prometteuses. Ce sixième sacre de Clarisse, c’est extraordinaire. On a des cyclistes qui sont capables de faire de grandes choses, on a toute une série de grandes dames. Je pense à une Pauline Ferrand-Prévot qui a réalisé des choses extraordinaires ces derniers mois, une Mathilde Gros, des femmes comme ça. En tennis, on a une Caroline Garcia qui peut émerger. En tennis de table, on a des espoirs là aussi prometteuses, on a les sœurs Lutz, il n’y a pas que les frères Lebrun. On voit qu’il y a un renouvellement et un printemps du sport français qui est super appréciable. On a nos handballeuses, nos volleyeuses, le foot féminin emmené par Hervé Renard, cette très belle équipe. Je pense que le fait qu’il exprime cette ambition, pas seulement autour de la Coupe du monde féminine, mais aussi des Jeux olympiques, c’est vraiment extraordinaire. Je pense qu’on a une variété, à travers les 54 sports, que ce soit sur le champ olympique ou paralympique, de magnifiques opportunités de voir le sport français et ces nouveaux espoirs rayonner.

Certains des sportifs que vous avez cités se sont plaint du prix des billets, le comprenez-vous?

Je l’ai dit incontestablement les tarifs les plus élevés sont très élevés pas plus que dans les éditions précédentes de jeux mais très élevés. Pourquoi ? S’il y a des personnes qui ont la capacité financière de payer ces tarifs c’est bon pour les recettes billetterie qui permettent d’éviter qu’il y ait un impôt JO et un déséquilibre dans les finances du comité d’organisation. Je rappelle qu’il y aussi à l’autre bout du spectre, beaucoup d’efforts qui sont fait pour l’accessibilité tarifaire de ces Jeux. Un million de billets à 24 euros la moitié des billets à 50 euros et moins. Au total, on n'a que 10% des billets qui sont au-dessus de 200 euros. Quand on voit un concert de Madonna ou de Beyoncé c’est plutôt 45 à 50% des places qui sont au-dessus de 200 euros, il faut faire très attention à tout ça. Je rappelle que c’est un immense spectacle, que ce sont les meilleurs athlètes de la planète. Je rappelle aussi sur c registre de l’accessibilité tarifaire que l’état et les collectivités territoriales font un effort incroyable avec une billetterie populaire pour l’état de 400.000 billets, une billetterie territoriale, des collectivités, de 500.000 billets, et un effort du comité d’organisation lui-même à hauteur de 100.000 billets pour des publics qui sont aujourd’hui en précarité. C’est, au global, un million de billets qui sont offerts. Quand on regarde les centaines de milliers de places qui sont gratuites pour la cérémonie d’ouverture qu’on met tout ça bout à bout ; c’est quasiment 10% des personnes qui vont assister au spectacle des Jeux qui vont le faire à titre gratuit, sans compte les épreuves sur route ou dans la Seine qui vont être complètement gratuites là aussi. Il faut je pense relativiser le discours, se souvenir que c’est le niveau de prix habituel, que les Jeux s’autofinancent sur le volet olympique, il faut bien qu’il y ait des recettes privées. Et en même temps je veux souligner l’engouement populaire qu’il y a eu, parce que les billets sont partis extrêmement vite, et de rappeler à chacun qu’il reste encore des opportunités puisqu’il y aura un troisième tour de vente, cette fois-ci sans tirage au sort. Il y aura les billets pour les Jeux paralympiques, et il y aura aussi une plateforme de revente qui permettra aussi, comme c’est le cas pour la Coupe du monde de rugby, de faire de nouveaux élus, de redistribuer les places. Je sais que certains ont eu la tristesse de ne pas être choisis, de ne pas être retenus dans le tirage au sort, c’est difficile, mais j’espère qu’à la fin tout le monde trouvera sa place dans l’aventure, et je suis confiante là-dessus.

Les jauges des stades ne sont-elles pas trop petites? 

On aura quand même 13,5 millions de billets qui vont être mis en vente, avec beaucoup de stades à grandes jauges mobilisés dans les territoires notamment sur les épreuves de foot. 

La place de la billetterie dans le modèle du budget est-elle trop importante? 

Je pense que boucler un budget pour les JO, c’est difficile, c’est exigeant. On voit bien qu’il y a un tiers issu de recettes de la billetterie, un tiers issu du CIO, un tiers issu des partenaires privés. C’est difficile de trouver des entreprises qui s’engagent, parce que les tickets sont assez élevés. On voit qu’il y aussi toutes ces polémiques, les marques peuvent aussi être un peu hésitantes à se mêler à une aventure qui est parfois critiquée, peut faire l’objet de certains amalgames, donc ce n’est pas facile. Je pense que les calibrages ont été faits aux bons niveaux. Il faut qu’on essaie de préserver cette capacité d’autofinancement tout en étant au rendez-vous de l’impératif d’accessibilité, tous ensemble. Ce qui est important pour moi c’est qu’il y ait l’embarquement de tout un pays. On l’aura grâce à l'accessibilité tarifaire, les associations, on aura des personnes en situation de handicap. On aura beaucoup de bénévoles du monde sportif. On aura des enfants, la jeunesse, des étudiants boursiers, des jeunes qui se distinguent par leur parcours citoyen. Toutes les composantes de notre société vont être embarquées dans l’aventure des Jeux.

L’apothéose de cette cérémonie des Jeux ne serait-elle pas d’avoir la flamme sur la Tour Eiffel?

Chaque annonce en temps utile. Je pense que Paris est la plus belle ville du monde. Je pense que cette cérémonie sera magnifique, on y travaille tous très dur, chacun dans nos rôles et nos responsabilités. J’ai toute confiance sur le fait que le spectacle sera éblouissant, et surprendra les Français, et le monde entier. Je vous laisse libre de vos pronostics. 

Que va-t-il rester de ces Jeux olympiques en matière d’héritage?

Il va rester une transformation de la Seine Saint Denis qui concentre 80% des investissements publics dans ces Jeux. Il va rester un immense progrès social et sociétal de cadre de vie qui est cette baignabilité de la Seine et de la Marne. On aura réussi à faire en quelques années ce que d’autres grands hommes politiques illustres auraient rêvé de faire et qui n’a pas pu être fait pendant des décennies. On va aussi laisser un héritage d’une nation sportive, avec plus de promotion du sport féminin, avec une plus grande inclusion des personnes en situation de handicap, avec le sport comme un moteur économique, qui est créateur d’emploi, dans le respect des exigences sociales. On va avoir des retombées économiques pour nos territoires, des recettes touristiques, c’est aussi une dimension importante de cet héritage. Je pense qu’on va avoir une forme de fierté retrouvée, et une forme de communion autour de ces Jeux olympiques et paralympiques qui, dans ces moments de transformation, qui sont parfois complexes à vivre pour notre pays, valent plus que tout. 

Le budget des sports va-t-il baisser après les Jeux olympiques?

Absolument pas. Chaque chose en son temps. Pour l’instant je suis dans la conception, et je viendrais ensuite défendre devant le parlement nos choix pour l'exercice 2024. L’engagement du président de la République et de la première ministre en faveur de la place centrale du sport dans notre société et un engagement de long terme, il n'est pas question de laisser tomber le sport français et le mouvement sportif, tous les éléments de politique publique que j’ai mis en place dans les territoires sont là pour durer. Je pense à la généralisation des 30 minutes à l’école primaire, au déploiement des heures en plus pour les collégiens qui ont besoin qu’on prenne soin de leur condition physique. Je pense à la promotion de la pratique sportive pour nos étudiants qui, post-covid, ont plus que jamais besoin qu’on soit là. Je pense au succès du plan sur les 5.000 équipements de proximité, terrains de sports, dans tous les territoires où on a besoin de continuer l’effort, ça nous est demandé par les collectivités locales. Il y également la rénovation thermique d’un certain nombre de ces équipements sportifs à travers le fond vert et des idées additionnelles que nous aurons sur la rénovation des équipements sportifs. Sur tous ces registres, le soutien au bénévolat, aux athlètes, à leur reconversion, cet accompagnement, ce suivi socio-professionnel, ce sont des engagements de long terme que nous allons porter dans les années à venir et nous serons portés nous-mêmes par l’élan des Jeux olympiques et paralympiques pour faire bouger les lignes du sport français.

Quand l’Etat a-t-il prévu de trancher pour l’avenir du Stade de France? 

C’est plus qu’un stade, et son avenir est évidemment extrêmement important. Il y aura plusieurs étapes. Je ne peux pas vous livrer de noms mais je peux vous confirmer qu’on a eu une pluralité de manifestations d’intérêts pour la cession et la concession. Le mois de juin est très important, parce que c’est une double étape qui va être franchie. L’Etat, avec le service de Bercy qui pilote ce projet sur le plan technique et opérationnel, va pouvoir à la fois indiquer aux candidats qui ont manifesté leur intérêt ceux qui sont retenus pour déposer des offres à l’automne 2023 et arrêter de manière définitive le dossier de consultation avec l’ensemble du cahier des charges et des clauses afférentes. Toutes les règles du jeu seront posées et stabilisées à compter du 30 juin à peu près. Ensuite, il y aura ce moment où les intéressés feront ou ne feront pas les offres et nous aurons à cœur de laisser le plus longtemps possible le choix et l'examen du meilleur projet entre les deux modèles. Ce qui est très important pour nous c'est de faire émerger ce meilleur projet pour ce stade et pour ce territoire en très bonne synergie en très bonne harmonie avec les élus locaux du territoire. Cela veut dire préserver la vocation sportive de ce stade, faire en sorte que nos grandes fédérations, le foot, le rugby, y trouvent toute leur place. Cela veut dire avoir de l’ambition, être prêt à faire des aménagements importants autour de ce stade, de sa configuration, avoir un dossier solide sur le plan technique, et qui préserve les intérêts économiques et financiers de l’Etat, et donc du contribuable. C’est tout ceci que nous allons regarder, et puis après, il sera temps d’opter pour la bonne formule, probablement au cours du premier semestre 2024, pour un renouvellement de la concession ou la suite des opérations qui sera effective à compter de l’été 2025. Il y a encore du chemin à faire. 

A moins de 50 jours de la Coupe du monde féminine de football, il n’y a toujours pas de diffuseur. Ce que l’on vit sur ce sujet est-il un scandale ?

Ce que l’on vit est totalement anormal et doit se solutionner. Il est juste impensable que cette très belle équipe de France emmenée par un sélectionneur exceptionnel ne trouve pas à être diffusée en clair sur nos postes de télévisions. C’est juste inconcevable. Cette situation va se régler. Je suis active, je mets cette saine pression dans le respect de l’indépendance des diffuseurs mais en leur indiquant que, derrière, il y a des enjeux sociétaux de promotion du sport féminin, du sport pour les femmes, pour les petites filles qui sont absolument capitaux, que cette équipe le mérite. Elle bat des records d’audiences dans ces matches amicaux ou quand elle est en demi-finale de l’Euro féminin. On voit qu’il y a cet engouement, cette envie des Français de voir plus de foot féminin à la télévision. Aujourd’hui, ce qui est un scandale, c’est qu’on ait que 5% des retransmissions de sport dans notre pays qui soient consacrées à du sport féminin. On a à peu près 20% de mix et les 75% restants ce n’est que du masculin. Ce déséquilibre est choquant, il n’est pas acceptable. Il faut qu’on se retrousse les manches pour qu’il y ait cette promotion du sport féminin. Dans le cas de cette Coupe du monde féminine, il faut que la Fifa fasse un bout du chemin, qu’elle soit moins gourmande. Parce qu’elle a fait ce choix de programmer cette Coupe du monde à ce moment-là, pour une Coupe du monde des clubs qui ne se tiendra pas cet été, mais plutôt en fin d’année. Compte tenu du fait que ce soit aux Antipodes, il y a une situation particulière en Europe à prendre en compte, parce que ce sont des matches qui seront retransmis à dix heures ou à midi. Ce n’est évidemment pas pareil qu’en prime time à 21h. Et de l’autre côté, il faut que nos diffuseurs soient conscients qu’on ne peut pas rester sur des écarts trop grands par rapport à ce qu’ils ont pu miser à l’échelle mondiale. Des écarts de 20 à 100, ce n’est pas possible. A l’échelle française, des écarts de 1 à 15, ce n’est pas possible non plus. Il faut qu’il y ait un engagement qui soit assuré pour qu’il y ait une valorisation juste de ces droits, qui suppose que chacun fasse un pas en direction de l’autre avec une volonté d’y arriver, une volonté d’aboutir.

Que fait-on si le blocage perdure? 

Je ne l’imagine pas.

Les pouvoirs publics sont-ils impuissants au-delà de la pression que vous pouvez mettre?

J’ai des conversations avec des chaînes privées, avec le service public aussi. Ces conversations vont s’intensifier dans les toutes prochaines heures, dans les tous prochains jours. J’appelle chacun à la responsabilité.

Serez-vous favorable à voir les joueuses de l’équipe de France avec leurs enfants en Australie? 

Je pense que ce qui est important c’est de préserver le libre arbitre des joueuses, avec différentes dimensions à prendre en compte : cette dimension de la maternité qui émerge de plus en plus dans le sport en raison de l’allongement des carrières, et qu’on doit absolument accompagner du mieux qu’on le peut. J’ai pris des engagements forts, pour veiller à l’équité des règlements sportifs, et pour mettre en place aussi des aides spécifiques en faveur de nos athlètes féminines, mais plus largement en faveur de la parentalité, hommes et femmes confondus. Je pense que ce fait là, d’avoir un enfant, tout petit, est rentré dans l’existence de nos sportifs et sportives de haut niveau. On le voit d’ailleurs à Roland-Garros en ce moment. La remontada d’un Gaël Monfils, il la doit aussi à sa petite. Ce sont des choses magnifiques. La remontada à sa façon d’un Lucas Pouille, sa petite fille n’y est pas étrangère. Les enfants peuvent être une incroyable source de force et d’épanouissement. Il est important que la vie de famille ait une place dans la vie du sportif. Après, il y a la vie du groupe, et ça, c'est le choix du sélectionneur, du staff, de mettre aussi les bons réglages, les bonnes limites. Il ne faut pas qu’il y ait une dissolution ou un risque d’affaiblissement des liens entre les joueuses. Ce sont des équilibres à préserver. Il y a autour de ces équipes beaucoup d’expérience, beaucoup de maturité, beaucoup de responsabilités. Je suis absolument persuadé que tout ceci est parfaitement orchestrable et compatible. 

Vous avez récemment annoncé des sanctions contre les supporters qui se rendraient coupables d’insultes homophobes. Concrètement, comment sanctionne-t-on un individu dans un stade pour ce type de faits?

Il y a différentes façons de pouvoir le faire, d’identifier ces personnes. On a aujourd’hui un certain nombre de caméras, de vidéoprotection. Il y a des éléments de billetterie nominative. On peut arriver à reconstituer et à identifier les auteurs de ces faits et gestes ou chants qui seraient inadmissibles. 

Sur la lutte contre l’homophobie, est-ce qu’il faut plus qu’une simple journée de sensibilisation? Avez-vous été choquée par les joueurs qui ont refusé de porter le maillot?

La lutte contre les discriminations, ce n’est pas un jour dans l’année, un jour qui est un peu symbolique et fort, le 17 mai aujourd’hui. C’est 365 jours par an et chaque année. Cette lutte, c’est 365 jours par an, chaque année, que ce soit au Qatar, dans la rue, sur nos terrains de foot, ou ailleurs. C’est extrêmement important de le dire et de le porter tous ensemble. Moi je veux saluer l’initiative qui a été impulsée pour la cinquième année consécutive par la LFP. Je considère que cette opération est un succès, ce message est essentiel pour la fraternité, le vivre ensemble, le respect de l’autre, l’égalité. Le fait qu’il y ait eu quelques joueurs qui ont voulu s’en dissocier, j’ai trouvé ça en effet navrant et je l’ai dit. Ils ont été pour partie sanctionnés par leurs clubs. Ces sanctions revenaient à leurs clubs. Je ne vais pas m’immiscer dans ce dialogue qui leur appartient. Ce que je souhaite, bien sûr, c’est avoir à l’avenir l’ensemble des joueurs qui puissent s’engager vers ce message de bon sens, de bien-être, de bon vivre ensemble. C’est fondamental.

On arrive dans une période de mercato. Est-ce qu’un départ de Kylian Mbappé vers l’étranger serait une catastrophe pour la France?

Kylian étant Français, rien ne sera jamais une catastrophe pour la France. C’est un bonheur, une fierté totale de compter cet extraterrestre fabuleux comme un représentant de notre nation. Oui, on a plutôt une préférence pour le voir jouer en France mais ce sont des choix qui lui appartiennent. Moi je fais toujours attention à ne pas me prononcer à la place des gens, de rester dans l’exercice de mon rôle. Il sait ce qu’il a à faire. Les clubs qui ont envie de lui, de le retenir… chacun doit prendre ses responsabilités. Ce qui me fait très plaisir, c’est qu’il soit le capitaine de l’équipe de France et qu’il ait envie de disputer les Jeux olympiques. Son message a été clair et enthousiasmant. Je crois qu’on a tous envie de le voir porter très haut les couleurs du maillot.

Etes-vous favorable à un retour du Grand Prix de France au Castellet ou à Nice?

Je suis favorable au fait de le mettre à l’étude. On est au travail, y compris à travers des échanges que nous pouvons avoir avec des grands élus expérimentés sur ces questions dans les territoires, à travers le mouvement sportif. La Fédération des sports automobiles a un rôle à jouer. On est au travail, on aura un dialogue nourri et constructif, on a entendu l’appel de la FOM sur ces sujets. Nous l’avons bien accueilli. On est au travail pour regarder ce qui peut être fait. Ce serait une chance, une opportunité. Il faut bien regarder maintenant les conditions d’un tel retour de la F1 en France, avec l’industrie automobile et pour aussi l’appuyer dans sa transformation, y compris sur le plan écologique.

L.Briley, N.Pelletier et J.Richard

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