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Mort de Pierre Cardin : il avait fait de son nom une machine à cash - Le Parisien

Cravates, ceintures mais aussi eau minérale, réveil matin, mobilier et même des boîtes de sardines : pas un objet n'a échappé à Pierre Cardin. Au fil des décennies, le couturier a bâti son empire - Forbes évaluait sa fortune en 2018 à 600 millions d'euros - à grands coups de licences, en donnant ainsi le droit à un fabricant ou à un distributeur d'utiliser son nom sur un produit ou un lieu en échange d'une redevance. « Il a transformé son nom en une machine à cash », décrypte Delphine Dion, professeur de marketing à l'Essec Business School.

« C'était très difficile d'avoir un nom dans la mode. Alors quand on en a un, il faut en profiter », se défendait-il en 2019 dans un entretien à l'AFP après avoir affirmé quelques années plus tôt que sa marque valait « un milliard ». « Il y a la ligne (de couture) mais aussi 800 produits, et si vous demandez un million minimum par produit, ça fait déjà 800 millions », précisait-il en 2011.

La « cardinisation », un cas d'école

Le couturier flaire le bon coup dès les années 1960 et devient un des premiers à se lancer sur ce créneau des licences. « Il avait cette volonté d'habiller tout le monde, de rendre accessible le luxe, affirme Audrey Patrizia Millet, historienne de l'industrie de la mode et du luxe. En permettant que son nom apparaisse sur des cravates, des boutons de manchette, il y a une forme de démocratisation, de massification de la marque. »

Cette stratégie lui permet aussi de conquérir d'autres territoires : la Chine, l'Argentine, le Brésil, l'Australie ou encore la Corée… « Il a été pionnier dans l'internationalisation. Il a mis un pied en Chine dès 1978 en organisant même un défilé de mode un an plus tard », rappelle Delphine Dion. « Je me suis étendu sur tous les domaines et mon nom a inondé le monde entier, grâce à mes licences qui assurent une vraie solidité à l'entreprise », aimait-il d'ailleurs mettre en avant. Ce modèle de licences poussé à l'extrême est même devenu un cas d'école dans les cours de marketing que les élèves connaissent sous le néologisme de « cardinisation »

«Sa marque ne fait plus partie de l'univers du luxe»

Mais en déclinant ainsi son nom à l'infini (sur des draps, des chaussures, du nécessaire de couture…), « il a fini par diluer l'image de la marque », regrette Audrey Patrizia Millet. « Il en a tué la désirabilité et la rareté, affirme même Delphine Dion. Non pas tant parce qu'il l'a apposé sur un grand nombre de produits mais plutôt parce que cela a été fait sans aucune cohérence ni de contrôle sur ce qui était produit et sur la façon dont s'était distribué. »

« Je ne dirai pas qu'il a noyé sa marque, nuance l'historienne. Elle ne fait plus partie de l'univers du luxe évidemment - pour les gens aisés, c'est même l'équivalent de Lidl - mais c'est devenu une marque populaire. Il a conquis les classes plus modestes pour qui avoir un costume ou des chaussures Pierre Cardin, ce n'est pas rien. »

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